Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog

Un autre argument entendu par les « relativistes » lors du mois d’août autour de l’épidémie du COVID-19, c’est « prendre des mesures barrière, ça contraint la population, ça la culpabilise, alors que ce n’est pas à elle de gérer la crise, il faut traiter cette épidémie en améliorant la prise en charge des malades lors de leur arrivée à l’hôpital ».

Sage parole au premier abord, car on pourrait se dire que les citoyens sont enquiquinés et privés d’une certaine liberté de vivre comme bon leur semble et qu’ils payent une mauvaise gestion de l’hôpital ces dernières années. Ce serait aux pouvoirs publics de remettre l’hôpital sur rails avec des moyens adéquats. Je vous passe tous les débats sur l’efficacité de tel ou tel traitement car ce n’est pas mon domaine (moi je sais manipuler les chiffres, pas la biologie humaine), et ça nous amènerait bien trop loin…

Le but de ce nouvel article est d’illustrer par une autre petite simulation l’illustration du fait que l’adage « le  battement d’ailes d’un papillon peut provoquer un ouragan au Texas » est plus que jamais d’actualité. Pour ceux qui n'ont pas lu l'article de base, je vous invite à le faire avant de continuer. Le voici ci-dessous.

Passons tout de suite aux simulations, en évoquant les hypothèses :

  • On va partir du principe que le R serait « naturellement » égal à 1 durant l’été, qu’il serait égal à 1,5 en automne et au printemps, et égal à 2 en hiver.
  • Par ailleurs, des mesures barrière permettraient de faire baisser ces taux de reproduction de 32%, donc en les multipliant par 0,68.
  • Une autre mesure barrière jugée « chiante et peu utile » permet par ailleurs de baisser le taux de 1% (oui, 1%, c’est vraiment très peu !!!), donc en les multipliant par 0,99.
  • Une mesure médicale (traitement, médicament,…) permet de diminuer le nombre de personnes hospitalisées qui vont devoir aller en réanimation de…….. X% (suspense, on va voir par la suite…).
  • On part des entrées en réanimation moyennes actuelles, de 29 par jour.
  • Les entrées en hospitalisation surviennent 2 semaines après la contamination.
  • La durée de réanimation est de 1 semaine (moyenne constatée), ce qui fait que le nombre de patients en réanimation est égal aux entrées en réanimation de la semaine.

On va alors effectuer les simulations sur une année, soit 52 semaines.

Concentrons-nous bien sur ce chiffre encore inconnu de X%. Lorsqu’on part du principe que la mesure médicale permet de diminuer le nombre de personnes hospitalisées qui vont devoir aller en réanimation de X%, cela veut dire que si par exemple :

  • X% = 20%
  • Sans la mesure médicale, lorsque 1 000 personnes arrivent en hôpital, il y a en a 100 qui doivent aller en réanimation

Alors la mesure médicale permettra de réduire ces 100 personnes de 20%, et donc de passer à 80 personnes qui partent en réanimation au lieu de 100 sur les 1 000 arrivées à l'hôpital.

La première simulation va consister à appliquer les mesures barrière classiques, à ne pas appliquer la mesure barrière « chiante et peu utile » et à ne pas appliquer la mesure médicale permettant de diminuer le nombre de personnes hospitalisées qui vont devoir aller en réanimation. Voyons ce que ça donne sur l’évolution du nombre de personnes en réanimation.

Gagner 1% sur une mesure barrière « chiante » ou 34% sur les soins hospitaliers ?

On constate que le pic de réanimations est de 7 000, soit quasiment le chiffre atteint en avril dernier. On est donc dans une dynamique confortable.

Maintenant, l’idée n’est pas forcément de chatouiller le maximum des capacités hospitalières, et on va imposer la mesure « chiante et peu utile ».

Gagner 1% sur une mesure barrière « chiante » ou 34% sur les soins hospitaliers ?

Il n’y a rien à faire, les exponentielles c’est quand même têtu, le nombre de personnes maximales en réanimation tombe à 4 600 personnes, en ayant appliqué une mesure barrière si peu efficace… Mais n’embêterait-on pas les gens pour rien ? Après tout avec un traitement médical efficace on doit pouvoir arriver à cette même baisse, non ?

La question à se poser pour y répondre est : « quelle valeur de X permettrait d’atteindre le pic de 4 600 personnes maximum en réanimation sans appliquer aux gens ce geste barrière qui décidément nous pourrit la vie ? Faisons la simulation et cherchons la valeur qui va bien.

Gagner 1% sur une mesure barrière « chiante » ou 34% sur les soins hospitaliers ?

Cette valeur est de 34%. 34% !! Oui OK, y’avait pas de suspense c’était dans le titre… Ce n’est pas rien, beaucoup de médecins et de soignants très dévoués aimeraient avoir à disposition un traitement aussi efficace. Pour info, la proportion d’entrées en réanimation par rapport aux entrées en hospitalisation était de 20% au début de la crise, et on a réussi à la faire baisser à 10-15% (cela fluctue ces dernières semaines), soit un gain substantiel de 25-50%. Mais les soignants ne cracheraient pas sur 34% supplémentaires !!

Maintenant, cherry on the cake, que se passerait-il si on faisait les deux ? Ben oui, on n’est pas bêtes quand même… On réapplique la mesure « chiante » et la mesure médicale.

Gagner 1% sur une mesure barrière « chiante » ou 34% sur les soins hospitaliers ?

On est descendu à 3 100 au pic des réanimations. L’union fait la force.

Le but de ce type de calcul n’est pas une nouvelle fois de simuler la réalité, mais de remettre un peu d’ordre dans nos perceptions : les mesures barrière et de manière générale tout ce qui peut faire baisser le taux de reproduction du virus aura un énorme impact sur les capacités hospitalières et la gestion de cette crise, y compris si la mesure barrière paraît « bien peu efficace » et « chiante ». Elle peut même jusqu’à avoir le même effet qu’un traitement révolutionnaire trouvé par une armée de chercheurs brillants.

C’est un travail collectif, il y a beaucoup de rancœur vis-à-vis des autorités présentes et passées, et ça peut se comprendre, mais on aura le temps de faire les comptes après, et ce n’est pas aux soignants qui se sont dévoués corps et âmes pour un salaire bien bas de payer nos états d’âme.

Partager cet article
Repost0
Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :